Rebecca Northan, qui signe le texte et la mise en scène d’All I Want for Christmas, a toujours pris la comédie au sérieux.
Le public du Théâtre Centaur se souvient de son fameux Blind Date, en 2019, mais cette artiste accomplie cumule plusieurs autres succès. Ce qui lie toutes ses créations, qu’elles soient écrites, improvisées ou en version hybride qu’elle appelle « théâtre spontané », c’est son message d’amour, d’empathie, de ludisme et d’espièglerie, le tout enveloppé dans un joli ruban de comédie.

Les racines théâtrales de Rebecca Northan remontent au Loose Moose Theatre de Calgary, en Alberta, où elle a foulé les planches pour la première fois dans le spectacle improvisé Theatresports, imaginé par Keith Johnstone. Elle a aussi étudié le théâtre classique à l’Université de Calgary aux côtés de Pamela Brook, ancienne étudiante du Festival de Stratford. Cette incursion simultanée dans les univers de l’improvisation et de Shakespeare a forgé, selon elle, son obsession pour les spectacles improvisés bien structurés, comme Blind Date.

“Pamela and Keith’s offices were side by side at the U of C, and each of them posted quotes on « Les bureaux de Pamela et de Keith à l’université étaient côte à côte, et chacun avait collé une citation inspirante sur sa porte. Celle de Pamela affichait une phrase célèbre d’Hamlet, “L’essentiel, c’est d’être prêt”, alors que celle de Keith disait “Ne vous préparez pas”. Je crois que j’ai en quelque sorte fusionné ces deux principes qui sont devenus le moteur de mon travail. »
Lorsque Blind Date, la pièce la plus acclamée de Rebecca Northan, a commencé sa tournée en 2010, un spectateur de Winnipeg l’a approchée pour lui demander si son style de théâtre avait un nom. À ce moment-là, elle ne s’était jamais posé la question, puis elle s’est arrêtée sur le terme « théâtre spontané », qui est depuis le nom de sa compagnie de production.
Le théâtre spontané
« Je voulais un terme qui reflétait à la fois la rigueur narrative d’une production et l’aspect improvisé qui est très important; l’expression “théâtre spontané” me semblait tout à fait juste. »

« Quand je travaille sur une pièce entièrement écrite, comme All I Want for Christmas, je cherche quand même à laisser une place à la spontanéité. Souvent, je vais inviter les acteurs à choisir un moment de la pièce où ils peuvent se réinventer à chaque représentation. Je trouve que ça les garde en alerte, et le public peut sentir cette effervescence. »
Rebecca Northan
Et la magie semble opérer. Depuis une dizaine d’années, Rebecca cumule les succès. Parmi eux, mentionnons Undercover — où un spectateur est invité à jouer les détectives pour résoudre un crime — qui a tourné avec trois compagnies majeures au Canada : Tarragon Theatre, de Toronto, Vertigo Theatre, de Calgary et Citadel Theatre, d’Edmonton.

Legend Has It, a family-friendly fantasy adventure, premiered at Alberta Theatre Projects’ playRites Festival and
Également, Legend Has It, une aventure fantastique pour toute la famille, créée au Festival playRites de l’Alberta Theatre Projects avant de jouer au prestigieux Brooklyn Academy of Music de New York. Enfin, n’eût été la pandémie, sa nouvelle création An Undiscovered Shakespeare aurait été présentée en première mondiale au Festival de Stratford en 2020.

Si certains surnomment Rebecca Northan « la reine canadienne de l’impro », elle n’est pas tout à fait à l’aise avec ce titre.
« Le Canada compte tellement d’improvisateurs formidables. Il n’y a pas de roi ni de reine! Et je ne suis pas qu’improvisatrice. J’essaie toujours d’intégrer les deux pans de ma formation dans mes créations. Je joue, j’improvise, je mets en scène, j’écris, je produis… Je l’avoue, je peux porter tous les chapeaux dans ce métier si cela me permet de gagner ma vie! Mais au fil du temps, je constate que j’ai surtout du plaisir à l’écriture et à la mise en scène. »
Northan’s scripted works bear her signature brand of humour and heart. Her first play, Kung Fu Panties, an ode to Les textes de Rebecca Northan portent tous sa marque d’humour au grand cœur. Sa première pièce Kung Fu Panties, une ode aux films d’action au féminin, a connu un tel succès à Calgary que les gens volaient les affiches devant le théâtre.

Rebecca a également de l’expérience en théâtre jeunesse, ce qui a fortement influencé ses comédies pour la famille Slipper – a distinctly Calgarian Cinderella Story et ZORRO: Family Code, toutes deux créées à l’Alberta Theatre Projects.
« J’ai tellement eu de plaisir avec les pièces Slipper et Zorro puisque je les ai co-créées avec deux amis très chers : Bruce Horak et Christian Goutsis. Nous avons commencé nos carrières à peu près en même temps et avons participé à plusieurs productions ensemble. Nos sens de l’humour se rejoignent et nous travaillons efficacement ensemble. Souvent, j’écris une première version, Bruce et Christian aident à rehausser la saveur comique, puis nous collaborons sur la conception sonore et la musique. C’est important pour nous que le texte et la musique soient en harmonie pour faire une bonne comédie. Nous formons un joyeux trio! »
Rebecca Northan Bruce Horak
La comédie a un rythme musical, et Bruce en est un pur génie
« J’ai rencontré Bruce en 1995 sur une production de Shakespeare dans le parc. Il est mon être humain préféré en création et, oui, nous avons même été mariés pendant un court moment. Nous n’arrêterons jamais de collaborer, car il est sans doute la personne la plus talentueuse que je connaisse, et je suis tellement reconnaissante que nous continuions d’être de proches amis et collaborateurs. Il me conseille sur le son d’All I Want for Christmas depuis les prémices du spectacle, et je suis si heureuse qu’il puisse signer la conception sonore. La comédie a un rythme musical, et Bruce en est un pur génie. Il va m’en vouloir de mettre autant de pression sur lui en disant cela, mais tant pis! »
All I Want for Christmas est née en 2020 d’une annonce publiée sur Facebook par Wesley Colford, à la direction artistique du Highland Arts Theatre au Cap-Breton, qui cherchait une pièce des Fêtes ne contenant « pas plus de trois personnages, une comédie de préférence canadienne et écrite par une femme ». Alors que la plupart des gens répondaient que ça n’existait pas, Rebecca Northan lui suggéra de l’écrire elle-même.
Le temps des Fêtes était la période de l’année préférée de ma mère
« Nous sommes en plein deuxième confinement, et le moment ne pourrait être mieux choisi. Le temps des Fêtes était la période de l’année préférée de ma mère, décédée en 1996; voilà pourquoi le personnage de Marge porte son nom. J’aime saupoudrer mes pièces d’éléments personnels. Je ne vous les dévoilerai pas tous, car je me garde une part de mystère, mais disons que le fait que Marge travaillait dans un centre d’appels à l’école secondaire ou que les chiffres la font pleurer, ça vient totalement de moi! Pour le reste, je laisse au public le plaisir de deviner ce qui est vrai… et ce qui ne l’est pas! »
Mariah Inger Gabe Maharjan Amelia Sargisson
« J’ai un peu le syndrome de l’imposteur à la mise en scène. Les acteurs sont si bons, si talentueux et si drôles que je n’ai presque rien à faire. Je leur fais une mini suggestion et ils en font une merveille. En répétition, je passe mon temps à essuyer mes larmes… de rire, bien sûr, mais aussi d’émotion tellement ils sont bouleversants. Ils sont formidables. »

Rebecca Northan sera de retour à Montréal en février pour enseigner à l’École nationale de théâtre du Canada. Ce sera la deuxième fois qu’elle offrira un stage en improvisation aux étudiants de première année. Si on lui demande quels sont ses prochains projets, elle répond : « Je fais un peu d’enseignement en ligne pour le Festival de Stratford, et j’écris un nouveau spectacle solo intitulé Burning Down the House, qui parle des femmes de la génération X en ménopause.
Eda Holmes agit comme mentore, et une fois que j’aurai pondu le texte, elle en sera la conseillère dramaturgique et signera la mise en scène… Du moins, je l’espère! Au-delà de ça, qui sait? Peut-être un film ou une série télé si je suis chanceuse. Seuls les dieux du théâtre savent ce qui m’attend. »